Territoires fabriqués/Territoires instrumentalisés Dans un contexte économique globalisé mais aussi de décentralisation accentuée, les acteurs des territoires ont intégré une exigence, voire une injonction : leur territoire doit être identifié, lisible et référencé, afin de mieux négocier son positionnement dans la mondialisation. Ce contexte nourrit des stratégies et des politiques de développement territorial centrées sur la notion d’attractivité, de compétitivité et d’offre territoriales. Pour certains territoires, le fort ancrage historique et identitaire dont ils disposent peut être aisément instrumentalisé pour asseoir les stratégies d’aménagement et de développement économique. Pour d’autres territoires en revanche, la construction d’un référencement découle d’une démarche volontariste d’énonciation et de fabrication initiée et développée par les acteurs institutionnels. Cependant, le territoire doit-il absolument être énoncé, borné et référencé pour s’inscrire dans le marché des lieux ou ne faut-il pas plutôt faire l’éloge de l’imperceptibilité du territoire ?
La complexité du territoire traverse l’ensemble des sciences humaines et sociales. Si le territoire est consubstantiel à la géographie, sa nature, sa réalité institutionnelle et ses usages sont aussi déterminants en histoire, en sociologie, en ethnologie, en droit, en économie, en sciences de l’information et de la communication, en marketing... Le territoire est une production et une construction sociale. Pour les géographes, il est un territoire approprié dans les deux sens du terme : approprié par quelqu’un et propre à quelque chose. Il est approprié par un groupe social, avec ses croyances, ses valeurs, son niveau de technicité, son modèle économique... et par ailleurs il est propre à des usages. Il est une construction sociale, une construction matérielle et symbolique (Brunet, 1991 ; Di Méo, 1998). De façon générale, deux grandes perspectives se rattachent à la notion de territoire. La première rappelle le caractère délimité et plus ou moins institutionnalisé du territoire. Depuis la décentralisation, l’action publique s’est territorialisée au prix d’un emboîtement compliqué d’échelles de territoires auxquels sont associées des compétences et des politiques publiques. L’enchevêtrement de territoires qui en résulte peut même s’apparenter à un encombrement territorial (Renard, 2000) ou encore à un millefeuille territorial, malgré les récentes dispositions qui visent à simplifier ses dispositifs. La seconde perspective envisage le territoire dans une dimension plus diffuse et beaucoup moins formalisée qui recouvre les différents rapports à l’espace qu’entretiennent les groupes sociaux. (Alphandéry et Bergues, 2004) On pourra parler de territoires informels pour évoquer les territorialités des individus : sentiment d’appartenance, appropriation par des pratiques sociales et culturelles déployées dans l’espace, rapports identitaires (degré d'enracinement du territoire dans les pratiques sociales de l'individu, attachement au territoire). Le territoire est ici avant tout culturel et symbolique. La notion est par conséquent polysémique par son caractère multidimensionnel : le territoire induit ainsi une multiplicité des approches conceptuelles et disciplinaires pour l’étudier (géographie, droit, économie, sociologie, anthropologie, SIC, marketing, etc.). En effet, certaines notions liées au concept de territoire nécessitent une approche transdisciplinaire, comme le marquage territorial qui illustre le territoire à travers des dimensions territoriales (frontière existante), institutionnelle (groupe humain contrôlant l'espace), symbolique (rattaché à l'espace : drapeau, emblème, appellations, héros, objets ou éléments). C’est aussi le cas des notions d’identité et de sentiment d’appartenance qui construisent un territoire dans des dimensions mouvantes, à la fois tangibles et intangibles, perceptibles et imperceptibles.
L'approche du marketing territorial s’attache depuis plusieurs années à caractériser l’identité comme une ressource territoriale en utilisant et appliquant des instruments marketing à des sites géographiques afin d’élaborer une offre territoriale censée accroître l'attractivité et l'hospitalité du territoire (Esthuis, 2014). Ces approches marketing fondées sur une connaissance de l'environnement appréhendée dans ses dimensions géographique, démographique, culturelle, économique, sociale et politique sont par ailleurs beaucoup discutées et remises en question par d’autres disciplines. En effet, les territoires sont multiples et dans leur mise en communication, ils sont directement en lien avec la question de leur représentation, de leur attractivité et des imaginaires qui y sont liés (Girard, 1999 ; Chamard, 2014). Il est donc nécessaire d’évaluer les composantes de cette image dans l’esprit des destinataires surtout à un moment de recomposition territoriale (simplification administrative, métropolisation, etc.) et dans un contexte fortement concurrentiel pour les territoires à l’échelle mondiale. Il faut ajouter à cela un échec relatif de certaines stratégies de marquage territorial ces dernières années, notamment lié à l’empilement des marques qui entraîne le brouillage dans la communication et la promotion des territoires à l’ère du numérique (Gagnon, 2007).
Dans le cadre du projet IDENSO et dans la perspective rappelée ci-dessus, l’équipe organisatrice du colloque analyse le territoire de la Bretagne Sud. Elle s’emploie à croiser les approches disciplinaires autour du territoire « Bretagne Sud », un territoire émergent aux contours flous, mais pourtant support de politiques et d’actions publiques, institutionnelles ou privées. Qu’est-ce que le territoire de la Bretagne Sud ? L’appellation renvoie à un territoire géographiquement non borné, mais s’agit-il d’un espace vécu, un territoire de communication ? Le périmètre suggéré par la Bretagne Sud est variable. Il s’agira parfois du Morbihan ; d’autres fois du ruban entre Lorient et Vannes, parfois encore du « continuum urbano-littoral » entre Quimper et Nantes. Cette géométrie variable suggère une appréciation différenciée du territoire par des acteurs qui s’y réfèrent pour des projets variés. Comment définir ces Bretagnes Sud ? Pour qui ce territoire fait-il sens et pour faire quoi ? Depuis quand le terme a-t-il émergé ? Que dit-il de l’évolution socio-économique et des représentations du territoire breton, et plus largement de la gouvernance des territoires contemporains ?
Plus généralement, répondre à ces questionnements autour de la construction et l’instrumentalisation actuelle des territoires est l’objectif de ce présent colloque. Il s’agit tout d’abord de contribuer à l’état de l’art sur les approches conceptuelles abordant la mutation et la fabrication des territoires d’une façon générale. Puis, un autre objectif est de confronter et de croiser, notamment par des études de cas, les analyses effectuées sur d’autres territoires, bornés ou non, revendiqués ou imperceptibles, supports et instruments de politiques de développement économique ou touristique, que ce soit en France ou à l’étranger.
Axe 1 : Territoires en fabrication : Mutation, recomposition des territoires et de leur identité Dans cet axe, il s’agit d’interroger les démarches en cours de mutation et recomposition des territoires à différentes échelles, du niveau local au niveau international. Seront ainsi évoqués la fusion des communes, la recomposition des intercommunalités, les nouvelles régions, les démarches interterritoriales… En quoi le contexte de recomposition du maillage administratif et institutionnel oblige-t-il les territoires à se redéfinir, à s’inscrire dans une dynamique de perpétuelle recréation ? Comment les territoires composent-ils avec la nécessité d’imbriquer les échelles d’actions dans le cadre de l’élaboration des politiques de développement territorial (cf. logiques interterritoriales sur les problématiques de transport, de tourisme, environnementales, …) ? Il s’agira aussi de s’intéresser à la construction des territoires par les dynamiques et les réseaux d’acteurs et leur articulation avec le cadre de l’action publique.
Axe 2 : Territoires identifiés / territoires imperceptibles et représentations des territoires
Dans cet axe, nous proposons de questionner les éléments de mise en visibilité des territoires (marques, labels, mentions, etc.) existantes ou en devenir, leur légitimité vis-à-vis des territoires auxquels elles font référence mais aussi leurs représentations auprès de leurs différents publics. Comment évaluer la qualité et l’efficacité de ces démarches au regard de son impact sur la représentation des publics ? Ces aspects entraînent logiquement une réflexion sur les dispositifs de communication à l’œuvre dans et pour les territoires. À l’heure de l’hyper-concurrence des territoires, quelles sont les formes émergentes et innovantes de ces dispositifs et comment s’articulent-ils avec d’autres démarches ? Il serait également intéressant d’analyser quel échelon territorial est le plus pertinent comme périmètre d’une mise en visibilité. Parfois les usages des dénominations territoriales ne se confondent pas avec les limites politico-administratives qu’elles sont censées référencer. Une pertinence au niveau communicationnel est-elle cohérente avec le fonctionnement du territoire, la mutualisation des actions ? Les critères géophysiques, les pratiques sociales et culturelles, les produits, l’imaginaire des territoires n’influencent-ils pas ces usages et la perception du territoire ? Dans quelle mesure sont-ils pris en compte ? Ces problématiques soulèvent aussi la question de leur nécessaire évaluation. Les spécificités des politiques de marques vis-à-vis d’autres types d’actions publiques impliquent-elles un cadre d’évaluation particulier ? Quels sont les outils d’évaluation déployés par les acteurs ? Ces outils permettent-ils analyse et recul pour les décideurs ?
Appel à communication : Ce colloque aspire à permettre la rencontre des universitaires qui analysent et étudient les mutations contemporaines des territoires. Il s’adresse à des chercheurs de différentes disciplines : droit, économie, marketing, sciences de l’information et de la communication, sociologie, géographie, histoire, anthropologie, gestion... Les chercheurs sont aussi invités à présenter des travaux de recherche empiriques, méthodologiques, pratiques ou conceptuels qui portent sur des thématiques associées aux axes proposés.
Propositions de communications et organisation du colloque : les personnes désirant présenter une communication sont priées d’envoyer par courriel un résumé n’excédant pas 5000 signes aux adresses suivantes florence.gourlay@univ-ubs.fr et claire.maheo@univ-ubs.fr au plus tard pour le 24 avril 2017. Sur la première page du résumé doivent figurer le titre de la communication, 5 mots clefs et l’axe thématique choisi, le nom et prénom du ou des auteurs, la fonction et le rattachement institutionnel ainsi que les coordonnées complètes (courriel, tél, adresse postale). Les propositions pourront être rédigées en français ou en anglais et envoyées au format word (.doc) ou rtf ou pdf.
Calendrier et lieu : - 24 avril 2017 : date limite d’envoi des résumés (5000 signes maximum en précisant les éléments suivants : problématique, méthodologie, terrain, approche théorique, résultats, références bibliographiques) - 15 mai 2017 : annonce des propositions retenues - 22 mai 2017 : diffusion du programme provisoire du colloque - 24 mai 2017 : date limite de confirmation de participation au colloque - 22-23 juin 2017 : colloque UBS Vannes (France) Dépôt des articles pour les actes du colloque : les auteurs des résumés acceptés seront invités à transmettre leur article complet avant le 15 septembre 2017, et ce, afin d’être inclus dans les actes du colloque. Voir les normes éditoriales des documents finaux sur le site Internet du colloque http://colloque-idenso.sciencesconf.org (à venir). Actes du colloque et meilleurs manuscrits ou «best papers» : toutes les communications acceptées seront publiées dans les actes du colloque. Toutefois, au moins un auteur de la communication doit être inscrit au colloque. Il est également prévu que les articles sélectionnés soient publiés dans le courant de 2017 dans un numéro spécial d'une revue classée. Coordination scientifique : Vincent BOYER, Faculté DSEG, Université Bretagne Sud, Lab-LEX Christine BOUGEARD-DELFOSSE, IUT de Vannes, Université Bretagne Sud, LEGO Lucile CHARTAIN, Post doctorante, projet IDENSO Leïla DAMAK, IUT de Vannes, Université Bretagne Sud, LEGO Florence GOURLAY, Faculté de Lettres, Langues, Sciences Humaines et sociales, Université Bretagne Sud, GEOARCHITECTURE Claire MAHÉO, UCO-Bretagne-Sud, PREFics Clément MARINOS, IUT de Vannes, Université Bretagne Sud, LEGO Pascale ERTUS, IUT de Vannes, Université Bretagne Sud, LEGO
Comité scientifique
Manuelle AQUILINA, Université Catholique de l’Ouest – Bretagne Sud, LEGO Guy BAUDELLE, Université Rennes 2, ESO Vincent BOYER, Université de Bretagne Sud, Lab-LEX Christine BOUGEARD-DELFOSSE, Université Bretagne Sud, LEGO Didier CHAUVIN, Université Rennes 2, PREFics Leïla DAMAK, Université Bretagne Sud, LEGO Florence GOURLAY, Université Bretagne Sud, GEOARCHITECTURE Michel GENTRIC, Université Bretagne Sud, LEGO Ronan LE DÉLÉZIR, Université Bretagne Sud, GEOARCHITECTURE Claire MAHÉO, Université Catholique de l’Ouest – Bretagne Sud, PREFics Éric PÉCHILLON, Université de Bretagne Sud, Lab-LEX Christine PETR, Université Bretagne Sud, LEGO Frédéric PUGNIÈRE-SAAVEDRA, Université Bretagne Sud, PREFics Philippe ROBERT-DEMONTROND, Université de Rennes 1, IGR
Organisation : Josiane LE GAL, secrétaire des Laboratoires HCTI, PREFics et GEOARCHITECTURE Nolwenn HENAFF, chargé de communication DSEG UBS
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